Discours de la Présidente Mme Monique RUBIN au 103ème Congrès Marchés de France ALBI

Mesdames, Messieurs, Chers collègues

Entre le Massif central et les Pyrénées, il est une région tranquille, préservée, un territoire secret qui a fait de son isolement séculaire un atout de premier ordre :
Bien chers collègues, bienvenue dans le TARN, L’AVEYRON et le LOT !!

Cette région retient de sa ruralité un gout pour les formes et les matières qui s’épanouissent dans un artisanat de qualité, les couteaux de Laguiole, les chapeaux de CAUSSADE, les paniers, les gants de Millau, les poteries d’ALBI…pour ne citer qu’eux !!

Sur ce terroir d’une grande diversité apparaissent en abondance les mets et vignobles dont la réputation dépasse largement les frontières régionales. Ces richesses naturelles et gastronomiques dont on croise souvent le fruit dans les halles et les marchés, vont de l’agneau fermier au bœuf de l’Aubrac, en passant par l’ail rose de Lautrec, à la saucisse sèche de l’Aveyron, aux fricandeaux et autres tripoux, du boudin galabard, au Melsat Occitan, des bougnettes du Tarn et autres fritons dont chacun se dispute la paternité !!
Grand nombre de ces spécialités puisent leurs racines dans des traditions ancestrales comme l’Estofinade du Lot ou le gâteau à la broche de l’Aveyron, ou liés à des événements historiques comme la soupe de gésiers qui était servie lors des grandes fêtes médiévales.

Et si on passe aux fromages, c’est une musique divine qui enchante nos oreilles : cabécous et rocamadours, pélardon et bleu des causses, roquefort et la célèbre recette des moines de l’Aubrac, le fameux aligot !! Comment ne pas citer aussi les truffes, les cèpes, les noix, les melons, tout cela arrosé par des cépages variés tel le Cahors, le fronton, le coteau du Quercy, le Gaillac et tous les vins aveyronnais !!

Voilà pourquoi, en ce début de propos, j’ai voulu vous mettre l’eau à la bouche et vous inviter à visiter ces marchés et halles pour découvrir par vous-mêmes ces richesses et sentir l’importance de préserver nos traditions et nos lieux de commerce, qui sont le reflet de l’identité culturelle de ces trois départements.

La naissance des villes a souvent été le résultat d’une complicité heureuse entre l’homme et son environnement naturel. Il a suffi que le Tarn devienne navigable, situé non loin d’un site facile à fortifier dominant un accès commode à la rivière, et les facteurs étaient rassemblés pour qu’apparaisse la cité d’Albi.

Albi : Une Ville Historique, au cœur de notre belle France, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, avec la cathédrale Sainte Cécile et le Palais de la Berbie. Ces monuments témoignent de la richesse de cette puissante citée épiscopale dont vous découvrirez les trésors durant votre séjour !!

Car vous comprendrez bien que, malgré toutes ces découvertes qui s’offrent à nos yeux, nous ne sommes pas réunis aujourd’hui que pour jouer les touristes !!

C’est avec une profonde détermination que je me tiens devant vous aujourd’hui, ici à Albi, pour aborder des enjeux essentiels qui touchent nos marchés de France. Nous sommes réunis non seulement pour célébrer la richesse de notre patrimoine commercial, mais aussi pour revendiquer des changements nécessaires qui garantiront l’avenir de nos marchés, ces lieux de vie, d’échange et de convivialité qui font la fierté de nos communes.

Aujourd’hui, plus que jamais, nous devons nous unir pour défendre nos intérêts, pour faire entendre notre voix face aux défis qui se présentent à nous.

Le commerce des marchés depuis les échanges sur les agoras, a vu se rapprocher les hommes en participant au croisement des civilisations, et au métissage des populations. Ne pensez pas que nous soyons là dans une lointaine Histoire !!

Certes, Le décor a changé, la communication, les monnaies d’échange ont profondément évolués, mais restent les mêmes luttes d’intérêts face aux méfaits et aux dérives de la mondialisation et le toujours plus numérique.

Au fil des siècles, la vie populaire s’est retirée lentement des places publiques, qui ont ainsi perdu une grande partie de leur importance commerciale. Seuls nos marchés arrivaient à résister ! Or, depuis plusieurs mois, nous assistons, médusés, à leur mise à l’écart, voir leur suppression au profit de projets financés par l’État, les plus à la mode étant « La végétalisation des centres villes » et les « halles gourmandes » qui sont loin d’être une réponse à la revitalisation de nos cœurs de villes !!

Nous avons eu trois ministres du commerce en à peine un an,
Un conseil national du commerce arrêté, alors que nous espérions davantage de stabilité pour renforcer le dialogue entre les décideurs et notre communauté.

Madame Véronique Louwagie, ministre déléguée en charge du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises a tenu dernièrement des propos très encourageants pour nos activités. Nous regrettons vivement que retenue au salon de l’Agriculture, elle ne soit pas là, à nos côtés car face à cet événement important que sont les assises nationales de la Fédération des Marchés de France, seule organisation de défense professionnelle reconnue au niveau national, forte de 128 structures syndicales et riche de  140 000 entreprises qui exercent sur le domaine public, sa présence était cruciale et sa participation aurait été un signe fort de soutien et d’engagement envers notre cause. Elle aurait pu nos expliquer le pourquoi de l’abaissement du seuil de franchise de TVA à 25 000 euros, mesure aux conséquences néfastes pour les TPE de notre secteur d’activités !!

Et pas de quoi être rassurés suite à l’annonce du premier ministre « On va négocier, discuter avec les intéressés eux-mêmes pour voir de quoi il s’agit. Je ne suis pas un spécialiste du dossier, je l’ai découvert en même temps que vous ». C’est tout de même un comble !! Qu’avec un 49/3 on fasse passer des dispositions rejetées au mois d’octobre par la représentation nationale car jugée trop impactant pour nos très petites entreprises !! Monsieur le Premier Ministre ne serait pas au fait des dispositions transcrites dans les textes présentés ?? Personne ne s’est inquiété des difficultés générées par une telle mesure sur nos petites entreprises qui se battent comme des lions pour survivre dans la jungle du commerce ?

Qui a dit que la vie d’entrepreneur était un long fleuve tranquille ? Aujourd’hui, c’est plutôt le grand huit que nous devons faire, et il faut s’accrocher pour éviter la chute, mais soyez assurés de la détermination de l’équipe fédérale, nous avons forcé les portes de Bercy pour y être entendues au plus tôt !!

Nous aurions pu espérer la venue de Françoise GATEL, Ministre de la ruralité, avec qui nous avons eu des échanges agréables, mais force nous est donné de déplorer que tous les producteurs qui exercent sur nos marchés, avec des circuits courts et des produits qualitatifs, ne reçoivent pas la même attention que ceux qui monopolisent le gouvernement au salon de l’agriculture !!

Voilà pourquoi, face à la complexité et l’instabilité politique ambiante, ne pouvant compter que sur nous, c’est à vous chers collègues que je souhaite prioritairement adresser mon propos, car c’est vous, dans les marchés, au cœur des territoires qui êtes non seulement une valeur économique indispensable mais aussi un lien social majeur, grâce à votre disponibilité, grâce à votre sens de l’accueil et de l’écoute, grâce à la qualité de vos conseils et de vos produits. Au quotidien vous démontrez votre volonté de vous engager, d’entreprendre et surtout d’accorder à la valeur travail ses lettres de noblesse !!

« La seule façon de faire un excellent travail est d’aimer ce que vous faites » a dit Steve Jobs

Nous sommes de gros bosseurs. Nous conjuguons à tous les temps le verbe « risquer » et savons pertinemment ce que cela peut vouloir dire.

Derrière cet acte courageux, nous créons de la richesse, des emplois et sommes les garants de la valeur travail car le travail remplit l’assiette !

Dans un monde où tout s’accélère, où la lecture de notre avenir proche ressemble à une partie de colin Maillard, le seul moyen de s’en sortir est de retrouver les fondamentaux : nos racines, nos valeurs. A ce propos, j’ai constaté comme beaucoup d’entre nous la dérive de certains de nos élus au fil des ans à l’Assemblée nationale.

Alors, oui, nous avons besoin d’élus, et de bons élus, pétris par la notion du bien commun, et non de ceux qui ont oublié que leur mission, c’est être au service des électeurs et non pas de leurs propres intérêts ! Nos finances sont à l’agonie, et pour autant, on nous demande de nous serrer encore plus la ceinture alors que beaucoup de d’élus de la nation continuent à mener grand train avec l’argent public !!

L’appât du gain serait-il plus fort que l’honnêteté et la dignité ?

Alors oui, dans ce monde en transition, il va falloir se réinventer en ne comptant que sur nous et sur ceux pour qui nous sommes l’élément indispensable de la vie économique des villes et villages : nos maires

Il faut ensemble se retrousser les manches et travailler main dans la main, sur le terrain ! Pour autant, nous n’accepterons plus le manque de consultations préalables telles que prévues à l’article L2224/18 du code général des collectivités territoriales concernant la totalité des obligations faites à nos élus locaux, que ce soit dans la consultation des organisations professionnelles pour les évolutions des marchés, les dispositions du règlement intérieur et dans les modifications des droits de place !

Si certaines municipalités cherchent des moyens de financement, ils ne doivent pas se faire sur le dos des commerçants du marché ! les droits de place sont des redevances pour occupation du domaine public, véritables services rendus aux populations, votées par le conseil municipal après avis des organisations professionnelles. Nous ne pouvons plus accepter que la survie de nos entreprises soit liée à des orientations financières prises aux mépris de nos règles de fonctionnement !

Nous allons continuer à nous battre car je suis persuadée qu’ensemble, on y arrivera !

De grandes lignes de travail devront être suivies :

De façon prioritaire, nous devons renforcer la collaboration entre tous les acteurs locaux

– Encourager la coopération entre les commerçants, les collectivités locales et les associations de commerçants sédentaires pour dynamiser les marchés et les commerces de proximité

– Proposer des événements réguliers (ateliers, dégustations, animations) pour attirer un public plus large possible

– Développer les efforts de modernisation et de professionnalisation de nos marchés pour attirer les touristes et les locaux

Ensuite obtenir un soutien renforcé au niveau national avec des mesures concrètes :

– Demander une meilleure visibilité et accessibilité des marchés, notamment par des campagnes de communication ciblées.

– Obtenir un plan de lutte contre les ventes à la sauvette, le travail illégal, les règles de sécurité

– Revoir les dispositions des articles L2224/18/1 et autre ordonnance d’avril 2017 pour garantir les transmissions de fonds de clientèle sur les halles et marchés de France

Puis travailler sur un avenir DURABLE :

Et pour ce faire, il n’y a pas de solution unique :

D’abord la promotion d’une consommation responsable en lien avec les enjeux environnementaux et les circuits courts

– Développer les règles de gestion des déchets et de lutte contre le gaspillage alimentaire

– Travailler sur le réel impact face au développement des ZFE. Nous dénonçons aujourd’hui une injustice sociale flagrante. En théorie, il s’agit d’une mesure environnementale, mais en pratique, elle frappe avant tout les classes populaires et les travailleurs les plus précaires.

En excluant des centaines de commerçants, les ZFE risquent de provoquer une catastrophe économique locale : Aujourd’hui, ce sont les plus modestes qui en paient le prix fort, avec le risque de se retrouver sans emploi simplement parce qu’ils ne peuvent pas changer de véhicules pour travailler !!

Nous devons préserver ces lieux de rencontre et d’échange qui sont si précieux pour l’économie et la culture locale.
C’est l’unité et la solidarité qui seront nos outils pour construire un avenir prospère pour nos marchés.

Et pour ça chacun doit faire sa part !!!

Connaissez-vous l’histoire du Colibri ?? Je l’ai empruntée à François Asselin, rapidement je vous la raconte : Une forêt bordée d’une rivière, brûle. Les animaux de la forêt s’enfuient. Reste un colibri qui sans cesse jusqu’à l’épuisement fait des allers retours entre la rivière et la forêt avec une goutte d’eau dans son bec qu’il libère sur la forêt en flamme.

Le voyant faire, les animaux de la forêt l’interpellent : « Et colibri que fais-tu ? » il répond : « je fais ma part ».

C’est beau mais me direz-vous inutile…

Pas pour lui car il veut accomplir son devoir, sa part.

Et s’il entraine avec lui une armée de colibris et tout ce qui vole, alors l’incendie peut ralentir le temps que le vent cesse et que tout s’apaise.

Et toi as-tu fait ta part ?

C’est une question que je me suis tout le temps posé et c’est une question que chacun d’entre nous devons nous poser.

Faire sa part. C’est se mettre en mouvement, s’engager, entreprendre… On ne fait pas sa part que pour soi mais aussi pour les autres.

Voilà pourquoi j’évoque devant vous cette histoire !! Car vous faites toutes et tous votre part !!

Chers présidentes, présidents, membres des bureaux syndicaux, je tiens à vous adresser mes plus sincères remerciements pour votre engagement indéfectible et votre dévouement tout au long de l’année. Votre travail acharné dans la défense des droits de nos adhérents face aux défis rencontrés, a été essentiel pour garantir la protection et le bien-fondé de notre profession.

Ensemble, la solidarité et la combativité forment un duo puissant. Elles nous encouragent à nous lever pour ceux qui en ont besoin, à défendre les causes qui nous tiennent à cœur et à travailler main dans la main pour surmonter les obstacles. Ces valeurs nous rappellent que chaque effort compte et que, ensemble, nous pouvons réaliser de grandes choses.
Avec un peu de créativité, d’engagement, nous avons le pouvoir de transformer nos marchés en véritables lieux de vie, de partage et d’innovation.
Et n’oublions pas : si un jour un élu vous dit que les marchés sont en déclin, répondez-lui avec un sourire : « Pas du tout !! C’est juste qu’ils prennent un peu de temps pour mûrir, comme un bon fromage ! »
Continuons à revendiquer, à innover et à faire briller nos marchés. Merci à toutes et tous pour votre détermination et à très bientôt sur nos étals des marchés de FRANCE !

Monique RUBIN